MUES
HUMAINES, sculptures réalisées sur le modèle
dans mon atelier, in situ ou à domicile,
ainsi que pendant des performances publiques Entre
1h et 1h1/2 de séance sont nécesaires pour réaliser
l'objet final MUE (sculpture-portrait,
seconde peau). Mais
certaines mues ont pu se développer sur 3, 4 ou 5 heures.
Une vidéo
de la séance, des photos, peuvent témoigner
de l'expérience. J'installe
aussi les mues dans le domicile -ou jardin- de la personne
muée.
Quand j'ai commencé
à réaliser des MUES HUMAINES, c'est avant tout le
processus de création de la mue, et les rencontres qu'il
suscitait, qui m'ont passionné.
Chaque mue suit un rituel spécifique,
autour d'une technique simple et radicale, l'enveloppement du
corps selon une spirale continue.
Lors des séances de mue, les films plastiques et les rubans
adhésifs épousent le corps selon la dualité
Derme/Epiderme.
La
performance est vécue de l'intérieur et dure le
temps désiré par le modèle, s'ouvre à
toutes possibilités de jeu et de voyage intérieur.
Vu de l'extérieur, le masque intégral qui recouvre
peu à peu son hôte le transforme en poupée
de chair et de sang, en corps désincarné, en marionnette
vivante. Mais pour la personne qui mue, c'est un rite initiatique
qui voile l'apparence et la vision pour atteindre à une
hypersensibilité intime, une révolution de son rapport
au monde, une mutation de la peau qui redéfinit les limites
du corps, interface et territoire à explorer. Le
vécu de chaque personne durant l'expérience, et
les images qui en résultent, diffèrent selon les
personnes et le déroulement du rituel.
Après
la libération par découpe de sa seconde peau, la
personne tient entre ses bras une forme qui lui appartient, hantée,
tout juste détachée d'elle et pourtant si intime,
son spectre, une vision de soi en 3D. L'objet " mue "
témoigne du rituel accompli, et devient fétiche,
imprégné de tout une histoire, mystérieusement
chargé. Manipuler
sa propre mue, c'est entrer en possession de son ombre incarnée,
prendre soin de son aura, fragile et aérienne, tenir dans
ses mains notre premier territoire intime, la peau. Les mues issues
de ces expériences sont ensuite intégrées
dans mes installations plastiques évolutives et/ou offertes
(rendues) à leur propriétaire.
Une
mue intégrale se déroule selon 4 phases successives:
- Pose du film étirable sur l'ensemble du corps (avec
des ouvertures pour
respirer)
- Fixation du film étirable (cello) à l'aide
de rubans adhésifs (scotch) déroulés
en bandes chevauchées
- Massage intégral pour assurer la cohésion
scotch/cello (principe
Derme/Epiderme) et la proximité avec la peau.
- Découpe de la seconde peau en une seule pièce.
Chaque séance est l'occasion de créer un rituel
particulier
ajusté à ce qui se passe, au ressenti et aux envies.
Toute mue
est singulière, réalisée sur-mesure
et ouverte à des improvisations concertées.
Le déroulement de la mue s'inscrit ainsi dans l'évolution
de mes recherches
personnelles, autant que dans l'alchimie des rencontres, et peut
déboucher sur d'autres performances, ou sur des installations
mêlant vidéo, rétroprojections, jeux de lumière,
bandes sonores.
Mue de Bruno
Mue d'Isabelle
LE
VéCU DE LA MUE
"La trace écrite au mois d'août existe encore, même
si elle se trouve datée. Il y est surtout question de sensations
tactiles. ...
Elles me paraissent plutôt étranges, parce qu'en souvenir,
elles deviennent légères, alors que si je vois du film étirable,
il me vient une très forte, voire énervante, envie de le
toucher, de jouer avec, de sentir sa plasticité entre mes
doigts. Et puis en me moulant le corps, il inversait ainsi
les rôles.
Ce qui me vient d'abord, c'est une idée de fraîcheur. Contre
la peau. La première couche fige déjà la peau comme en remplaçant
l'enveloppe membraneuse par une autre et limite les mouvements
superficiels. Pourtant, elle semble beaucoup moins dure
que le scotch. Les extrémités, particulièrement les mains,
sont rétrécies dans une posture de tassement (poignets cassés,
doigts les uns sur les autres...). Les jambes doivent se
maintenir desserrées et les bras à distance du buste pour
ne pas couper la circulation du sang et la respiration.
(Probablement arborais-je une parfaite dégaine de cow-boy
!)
Par rapport au premier enrobage, le scotch, aussi, constituant
la seconde couche, accentue l'effet sonore, qui lui-même
devient tactile. Tout le corps fait caisse de résonance.
Je sentais l'écho de ce son contre mon buste et la pression
du scotch là où il était accroché. Cela participe vraiment
à l'impression d'entrer dans un cocon, comme si c'est le
corps qui provoque le son, sauf que nous (les oreilles)
sommes à l'intérieur.
Le mouvement aussi, micro, provient de l'intérieur. Il vibre,
dans le moulage. Le corps est contenu. Le plus agréable,
ce sont les ailes. Les bras contraints à une presque absolue
immobilité, les omoplates se mettent enfin à vivre ! Elles
frétillent et incitent à se confondre avec les oiseaux.
En t'écrivant ces mots, je ne peux m'empêcher de me remettre
à les bouger. Ô joie de voler ! C'est possible. Et sans
risque.
Et puis il y a eu ce fameux moment où tu m'as soulevée de
terre. C'est fou d'ailleurs, l'expérience reste très plaisante
dans mon souvenir, mais la mue, durant cet instant, m'a
dépourvue de mes sens (mise à part la vue). Aucune appréhension
de la chute en arrière signifie également l'absence de la
sensation de se laisser tomber. J'ai compris que tu me faisais
basculer parce que le peu que je voyais bougeait. En fait
je me suis trouvée en apesanteur.
Une fois retirée, la mue, ce gros morceau de scotch, me
reste autant qu'un bout de moi. Une chose que je garde,
et regarderai, précieusement. Je te remercie pour ce passage
et te souhaite un très bon chemin." Aude
Les
exuvies sont les enveloppes laissées par
les insectes après leur mue.
Comme
tous les arthropodes, les araignées sont recouvertes d'une cuticule
plus ou moins rigide selon les parties du corps. L'opistosoma
(abdomen) est souple et peut se dilater lorsque l'animal se nourrit
ou lorsque la femelle est pleine d'oeufs, alors que le prosoma
(céphalothorax) et les membres sont recouverts d'une cuticule
beaucoup plus épaisse et rigide. La rigidité de cette cuticule
pose un problème lors de la croissance de l'animal : pour grandir
celui-ci est obligé de "changer de peau"...
On appelle ceci la mue. L'épiderme sécrète une nouvelle cuticule
sous l'ancienne qui se décolle après avoir été en grande partie
dissoute par l'épiderme (la plupart des matériaux sont "recyclés").
Puis l'ancienne cuticule se fend et l'animal en sort laissant
derrière lui ce qu'on appelle une exuvie et que l'on peut
facilement observer accrochée au bas des toiles chez certaines
espèces. Les gens confondent souvent ces exuvies avec des cadavres
d'araignées. Chez les araignées, l'exuvation commence en général
par l'avant du prosoma qui s'ouvre en deux, puis deux fentes se
forment de chaque côté de l'opistosoma, ensuite vient le tour
des appendices qui doivent être extirpés de leurs gaines. Ceci
demande de nombreux efforts à l'animal et il n'est pas rare que
celui-ci meure ou perde un membre lors de la mue. Les membres
perdus peuvent être regénérés lors de la mue suivante. Une
fois sorti de son ancienne cuticule, l'animal doit attendre que
son nouveau squelette externe sèche et se durcisse au contact
de l'air.
La
plupart des araignées européennes ne vivent qu'un an. Elles effectuent
de 5 à 10 mues, selon les espèces, lors de leur vie juvénile jusqu'au
stade adulte où elle sont aptes à se reproduire. Chez les araignées
vivant plusieurs années, les femelles peuvent effectuer d'autres
mues à l'état adulte. La mue est une phase critique de
la vie de l'araignée pendant laquelle l'animal est très vulnérable.
C'est pourquoi les araignées se retranchent dans un endroit calme
pour muer. De nombreuses espèces tissent une loge de mue
dans une anfractuosité ou sous une pierre, d'autres se pendent
à un fil pour avoir une plus grande liberté de mouvement.
De
nombreuses araignées meurent durant la mue, soit parce que celle-ci
se déroule mal, soit par prédation. Chez certaines espèces les
mâles attendent près des loges des femelles immatures que celles-ci
effectuent leur dernière mue. S' ils s'accouplent juste après
la mue, les crochets venimeux de la femelle n'étant pas encore
durcis, ils ne courent aucun risque de se trouver dévoré
après l'acte.